De France
La French touch (c'est-à-dire « la patte française ») est une expression désignant une grande partie des disques de musique électronique française des années 1990, particulièrement de la house music et du downtempo, produits par des artistes français, notamment Laurent Garnier, Lifelike, St Germain, Air, Cassius, Superfunk, Étienne de Crécy, Benjamin Diamond, Alan Braxe, et surtout Daft Punk. Si cette appellation générique a pu servir à qualifier les artistes français de musique électronique d'acteurs de la French touch, on s'accorde aujourd'hui sur le fait qu'elle s'applique de façon privilégiée à la house française, fondée sur un rythme house classique mais puisant son originalité dans l'utilisation de samples filtrés provenant majoritairement du funk et du disco.
L’Histoire
Le point de départ de l'histoire de la house en France est l'année 1988 avec la décision du premier ministre britannique Margaret Thatcher, devant l'hystérie provoquée par le Summer of Love de 1988, d'interdire les rassemblements autour de la musique répétitive1. Cette mesure anti-techno va inciter les grandes raves (fêtes techno) du Royaume-Uni à s'exiler en France2.
À l'été 1988, les jeunes Français découvrent les raves. Parmi eux, Laurent Garnier, qui sera l'un des premiers à mixer les classiques techno et house de Chicago et Détroit à Paris. Plus tard, un label britannique underground et avant-gardiste, Mo' Wax, semble avoir influencé certains des précurseurs de la scène française 3 comme Étienne de Crécy et Philippe Zdar (futurs Motorbass), Snooze alias Dominique Dalcan, DJ Grégory, Shazz ou Kid Loco, alors férus de rock, de hip-hop ou de jazz. Aussi les influences de cette génération d'artistes se trouvent-elles non seulement dans les tubes acid jazz et techno de l'époque mais aussi dans le funk, la disco, le jazz et la soul.
Dès 1994, ces artistes commencent à produire et à éditer des titres qui grimpent rapidement dans les classements (charts) britanniques et ne laissent pas indifférents les critiques d'outre-Manche. La French touch balbutiante voit apparaître de plus en plus d'artistes tels que Air, Dimitri from Paris, La Funk Mob ou DJ Cam, produisant des sonorités très influencées par le trip hop. De même, les Daft Punk commencent à travailler chez eux sur leurs premiers maxis. En France, le mouvement est encore très marginal, et se concentre en quelques points névralgiques de la capitale, notamment chez les disquaires où ces mêmes artistes sont à l'affût des nouveautés.
En 1995, la French touch commence à prendre véritablement son essor avec la sortie de l'album Boulevard de St Germain, de son vrai nom Ludovic Navarre. Un disque au son acid jazz et deep house, encensé par la presse britannique notamment via le New Musical Express ou encore Mixmag4.
Puis en 1996, c'est au tour du duo Motorbass de connaître un succès mondial à la sortie de l'album Pansoul. À la fin de la même année, l'album Homework des Daft Punk achève d'établir ce mouvement musical sur les scènes nationale et internationale5.
Dans la foulée, d'autres artistes participent à ce phénomène : Étienne de Crécy avec sa compilation Super Discount, Cassius, Alex Gopher, Demon, Dimitri from Paris, ou encore Air. Devant la fraîcheur et l'originalité que possèdent alors ces artistes provenant quasi-exclusivement de France, la presse anglo-saxonne a l'idée de nommer tout simplement ce son French touch. Beaucoup d'artistes français seront dès lors étiquetés French touch, comme en témoigne la diversité des productions de l'époque. L'année 1998 est marquée par le titre Music Sounds Better With You de Stardust, un morceau produit par Thomas Bangalter, Benjamin Diamond et Alan Braxe, devenu emblématique de ce mouvement, et qui se vendra à plus de 2 millions d'exemplaires dans le monde dès les premiers mois.
L'expression French Touch n'est pas une invention de journaliste, elle tire son origine d'un blouson créé par Eric Morand pour F Communications et portant l'inscription We Give A French Touch To House (que l'on peut traduire par « Nous donnons une touche française à notre musique house »)6. Mais les journalistes britanniques ont popularisé le terme et ont contribué à la diffusion du mouvement lorsque, à partir de l'année 1996, arrivèrent des productions électroniques françaises en grande quantité et surtout de grande qualité comme les albums Homework (1997) et Discovery (2001) des Daft Punk, Moon Safari (1998) de Air, Strange Attitude (2000) de Benjamin Diamond, Modjo (2000) du groupe éponyme, Hold up (2000) de Superfunk, Tempovision (2000) d'Étienne de Crécy ou encore le titre phare de Lifelike, The Soul Of My Love (2001).